20 Janvier 2021
Image d'illustration: Image par slavom de Pixabay
temps de lecture 3'
La voie unique.
J’ai une affection toute particulière pour les lignes à voie unique. D’abord parce que j’y ai commencé ma carrière et que j’en garde à ce titre une certaine nostalgie, ensuite parce que c’est sur ces lignes que la sécurité des circulations prend à mon avis tout son sens. Quand vous travaillez sur un tronçon où un peu plus d’une cinquantaine de trains circulent sur une tranche d’une quinzaine d’heures et que vous enchainez les croisements y compris les croisements sans arrêt, les dépassements, les reports de croisements, les trains qui desservent, ceux sans arrêt, la circulation des trains MI, les trains à l’heure et ceux qui ne le sont pas et tout cela sur une seule voie, vous avez vraiment l’impression de « faire du chemin de fer » ! Cette ligne sur laquelle j’ai effectué mes débuts a d’ailleurs été transformée par la suite en CCVB (commande centralisé de voie banalisée) pour lui permettre de monter encore en débit.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, faisons un peu d’historique de ces lignes à voie unique qui ont toujours fait l’objet d’attentions particulières en raison du risque de nez à nez omniprésent (voir article sur le nez à nez sur ce blog).
Ainsi, au début, il a été envisagé d’exploiter ces lignes en navettes (à noter qu’à ce jour une quinzaine de ligne sont gérées sous cette forme). Un seul train effectuait des allers et retour sur une section de ligne dont le parcours était forcément limité en longueur sous peine de réduire drastiquement le débit. Etant seul à circuler, il ne pouvait y avoir de risque de nez à nez ni de rattrapage.
Puis l’équipement des trains sur ces sections de ligne à une voie a vu apparaitre la présence d’un pilote unique. Celui-ci, de par sa présence à bord au côté du mécanicien (conducteur), lui donnait l’assurance qu’aucun train ne pouvait se trouver simultanément dans l’intervalle entre les deux gares à moins que le pilote ait un don d’ubiquité ce qui ne s’est heureusement jamais produit. Pour que cela fonctionne de manière optimum il fallait que le graphique des circulations soit optimisé pour que les mouvements de sens pair et impair s’équilibrent et bien évidemment cela n’était pas le cas. Lorsque deux mouvements de même parité devaient se suivre à faible intervalle de temps, une mesure palliative avait été trouvée, elle consistait à envoyer le pilote se présenter au mécanicien pour qu’il constate de visu qu’il n’était pas en ligne sur un autre train et que l’intervalle était donc libre de tout train de sens contraire (un ordre écrit pouvait être remis au conducteur). Le pilote prenant ensuite le deuxième train jusqu’à la gare en aval et revenait à sa gare origine par un train de sens inverse. Il fallait donc autant de pilotes que d’intervalles à protéger en termes de nez à nez d’où le coût dispendieux qui en découlait et qui a amené l’évolution suivante.
Ayant fait le constat que la plus value humaine du pilote n’était pas avérée, celui-ci a été remplacé par un bâton d’où le fameux « bâton pilote » dont vous avez dû sûrement entendre parler. Le principe était le même que celui décrit précédemment, le chef de gare le remettait au mécanicien du train de sens pair par exemple qui le restituait à la gare suivante pour être remis, en retour, sur un train de sens impair. La possibilité de montrer le bâton au mécanicien sans le lui remettre était également permise dans le cas où plusieurs trains de même sens devaient se suivre.
Si vous avez observé attentivement le mécanisme du « pilote », qu’il soit humain ou matériel, vous avez constaté que si deux trains se suivaient, le risque de nez à nez était bien couvert mais pas le risque de rattrapage d’où l’espacement par le temps qui devait venir compléter la méthode du « pilote ».
On a aussi expérimenté une gestion des intervalles entre deux gares par des demandes de voie par télégraphe un peu similaire dans son application à la circulation des trains à marche indéterminé (voir explication dans l’article sur le nez à nez).
Toutes ces expérimentations allaient donner naissance au système de block ou cantonnement par appareils.
Ceci nous amènera à aborder, dans le prochain article, l’équipement et les conditions d’exploitation des gares de voie directe type SNCF équipées de block manuel de voie unique (BMVU).