27 Mai 2021
Image d'illustration Het Utrechts Archief, CC0, via Wikimedia Commons
Sources : SIA journal des ingénieurs de l’automobile avril 1937, Le génie Civil 15 septembre 1934, Le génie civil 23 novembre 1935, revue Omnia septembre 1934 site Gallica.bnf.fr / BnF, Revue Générale des Chemins de Fer novembre 1935 site https://www.retronews.fr/, Revue Ferrovissime n°57 février 2013, Revue Ferrovissime n°3 Mars 2008, Loco revue n° 809 de décembre 2012
Automotrice TAR 34 et 36 société Franco Belge
Le réseau du Nord, qui a toujours été à la pointe du progrès dans les relations rapides comme celle de la Flèche d’Or ou bien celle de l’Etoile du Nord, a poursuivi dans cette voie mais en s’appuyant sur le nouveau concept émergent en ce début des années 30, l’autorail ou l’automotrice, terme plus utilisé par les réseaux. C’est pourquoi, profitant de ses lignes à profil favorable et aux vitesses élevées, le réseau du Nord avait choisi d’expérimenter la piste des automotrices rapides pour ses relations à fort potentiel de clientèle.
Contrairement à Bugatti qui avait préféré une motorisation à essence – en fait un mélange essence/Benzène/alcool dans la proportion 55/30/15 – avec transmission mécanique, les chemins de fer du Nord avait opté pour une technologie d’outre Rhin qui s’inspirait de rames à grande vitesse dotées de moteurs Diesel et de transmission électrique. En voici une photo.
A comparer avec les rames retenues par les chemins de fer du Nord : les TAR 34 et 36 dont voici une photo.
Caractéristiques générales.
Construites par la Société Franco-belge à Raismes, les automotrices TAR – Train Automoteur Rapide – avaient un profil aérodynamique très élaboré qui, rétrospectivement pourrait être considéré comme un anachronisme pour l’époque tant il se démarquait de tout ce qui pouvait se faire dans ce domaine. Même les Bugatti semblaient être d’une génération précédente !
La vocation des ces TAR 34 de la première série comme les TAR 36 de la seconde étant la vitesse, des essais à l’aide d’une maquette au 1/15 dans une soufflerie avaient permis de déterminer les formes les plus adaptées pour favoriser les écoulements de l’air et réduire les tourbillons. C’est ainsi que des jupes enveloppantes constituées de tôles incurvées en Duralumin couvraient les bas de caisse et que les faces frontales des deux extrémités avaient une forme ovoïde propre à une meilleure pénétration dans l’air. Même les marchepieds avaient été conçus pour assurer une parfaite continuité des formes en marche puisqu’il s’effaçait complètement en se rétractant grâce à un commutateur de commande par électrovalve mise à la disposition du conducteur. L’intercirculation était recouverte d’une enveloppe de caoutchouc tendue afin d’éviter la rupture aérodynamique qui se serait produite si on avait eu recours à un soufflet du type plus conventionnel. Enfin, les glaces des baies n’étaient en retrait que de 4 mm par rapport à la surface extérieure de la caisse car les essais avaient montré que le décalage habituel, beaucoup plus important, entraînait une résistance accrue. De tous ces aménagements, ainsi que d’autres non cités comme le carénage des échappements, il en ressortait une amélioration sensible du coefficient aérodynamique qui n’était que de 0,32 alors que la moyenne pour un véhicule de chemin de fer était de 0,80.
Chaque élément de la rame reposait sur deux bogies et mesurait environ 20,8 mètres soit 62,5 mètres au total. Les deux motrices disposaient d’un intérieur aménagé en classe mixte. Trente voyageurs de 1ère classe pouvaient y prendre place et 52 en seconde. Un buffet bar, dont l’exploitation était assurée par la Compagnie des Wagons Lits, venait compléter l’équipement de confort proposé à la clientèle. Quant à la remorque centrale, elle offrait 62 places exclusivement en seconde. Cette configuration évoluera avec la deuxième série (TAR36) car, pour rendre plus confortable le voyage en première classe en l’éloignant du bruit des moteurs, c’est la remorque du milieu qui accueillera la première et le bar. Terminons pour être complet par les 4 compartiments à bagages et les 3 WC disponibles. De plus une chaudière à charbon était placée dans un compartiment à bagages. Elle permettait la circulation d’eau chaude dans des radiateurs formés de tubes de cuivre et d’ailettes qui étaient disposés longitudinalement sous les baies.
Concernant les places assises, la remorque disposait d’un couloir médian avec deux places de chaque côté. La disposition était différente dans les motrices du fait que le couloir de passage était décentré. En première classe il y avait un siège d’un côté et deux de l’autre alors qu’en seconde on trouvait un aménagement 1+3. De la moquette recouvrait le sol en première alors que la seconde devait se contenter de linoléum. Voici une vue d’un compartiment voyageur en seconde qui tranche avec l’allure moderne de la caisse en extérieur. On se croirait presque au 19ième siècle !
Par contre, en première classe, les sièges individuels étaient habillés de cuir rouge.
La rame de 3 voitures pesait 123 tonnes, chacune des motrices en pesant 44. La vitesse limite était fixée à 140 km/h mais près de 160 km/h avaient été atteints en essais.
La livrée se démarquait des couleurs habituelles du réseau Nord pour arborer une teinte en deux tons : gris clair et gris foncé.
Caractéristiques mécaniques
Les deux moteurs Diesel Maybach disposaient de 12 cylindres en V sous un angle de 60°. A 1400 tours/mn, ils développaient 410 chevaux de puissance unihoraire et 380 chevaux en continu. Les moteurs de la deuxième tranche développeront 410 chevaux en continu.
Du fait de leurs poids de 1950 kilos et de leurs faibles encombrements, ils pouvaient être placés sur un bogie comme on le voit ci-dessous. C’est le bogie de tête de la motrice qui portait l’ensemble moteur génératrice
La transmission de la puissance était réalisée par l’intermédiaire d’une génératrice alimentant en courant deux moteurs électriques de traction sans interposition de résistances. Ces moteurs étaient suspendus par le nez et portés par le deuxième bogie.
La génératrice était auto excitatrice et elle ne s’amorçait que lorsque le moteur tournait à 800 tours/mn. C’était en agissant sur l’admission du combustible qu’on augmentait la vitesse de rotation du groupe générateur. Il y avait cinq régimes de fonctionnement du moteur.
La cabine de conduite
Le schéma ci-dessous donne la signification de tous les organes de commande mis à la disposition du conducteur
Après le schéma, la vue de la cabine de conduite.
Le Freinage
Pour le freinage de service, l’automotrice disposait du frein à commande oléopneumatique Lockheed agissant par l’intermédiaire de deux sabots montés sur toutes les roues. La pression sur les sabots était réglée par un régulateur centrifuge en fonction de la vitesse.
Un frein électromagnétique à sabots se déclenchait pour le freinage d’urgence. La commande de ces deux dispositifs s’obtenait au moyen d’un seul robinet à la disposition du conducteur. La position moyenne de celui-ci correspondait au freinage oléopneumatique et les positions extrêmes au serrage du frein électromagnétique.
Les performances de freinage étaient qualifiées de remarquables. A 140km/h et sur rails mouillés, l’arrêt était obtenu en 850 mètres.
L’attelage entre les véhicules était du type automatique Willison avec des tampons à ressorts hélicoïdaux.
Un dispositif « d’homme mort » était relié à la poignée du contrôleur du régulateur. Si le conducteur lâchait cette poignée plus de six secondes, l’arrêt du moteur était commandé ainsi que le freinage du train. Pour éviter un arrêt intempestif, une sonnerie alertait le conducteur dès que le décompte était enclenché.
Desserte assurée et carrière des TAR 34 et TAR36
Les TAR 34 étaient les deux rames prototypes construites en 1934 d’où le numéro 34 suivant le sigle TAR. Les motrices ont d’abord été numérotées ZZ101 à104 (XF 1001 à 1004 par la suite). Elles ont été utilisées sur la relation entre Paris et Tourcoing en desservant Amiens, Arras, Douai, Lille et Roubaix. Paris - Lille était effectué en 2h45 soit un gain de 20 minutes par rapport aux trains à vapeurs alors que les TAR desservaient en plus la gare d’Amiens. Les Dimanches d’été, un service spécial avait été créé entre Lille et Etaples.
Les TAR 36, dont la livraison a commencé en 1936, ont été livrés à hauteur de 19 motrices et 8 remorques. Trois motrices faisaient office de réserve. La numérotation prenait la suite des TAR34 : ZZ105 à 123 (XF 1101 à 1119 par la suite). A partir de 1937, les relations desservies s’étoffaient et s’internationalisaient. Les TAR reliaient Paris à Bruxelles en 3 heures et Paris à Liège en moins de 4 heures. La fréquentation augmentant sensiblement, la rame TAR devait être remplacée par un train à vapeur offrant plus de capacité de transport. Se trouvant momentanément sans utilisation une rame avait été engagée sur la relation Paris Strasbourg.
Pendant toutes leurs carrières, les rames TAR 36 seront affectées en gérance au dépôt de Paris La Chapelle.
Après guerre, les rames en état de circuler ont été utilisées sur Paris Lille puis sur Paris Lyon à partir de 1946 puis sur Paris Bâle. Elles feront même la liaison Paris Amsterdam entre 1954 et 1957, date à laquelle elles seront remplacées par les nouvelles Rames de Grands Parcours TEE.
La radiation interviendra en 1959, aucune rame n’a été conservée.
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