22 Juin 2021
Image d’illustration : Le génie civil 16 juillet 1938 site Gallica.bnf.fr/BnF
Sources : Le génie civil 16 juillet 1938 site Gallica.bnf.fr/BnF , La correspondance ferroviaire n°12 avril/mai 2004 et la correspondance ferroviaire n°2H janvier 2004.
L’automotrice de Dietrich à gazogène
Si les véhicules à gazogène ont connu un grand essor pendant la guerre en raison de la pénurie d’essence, il faut savoir que cette technologie avait déjà séduit les réseaux de chemins de fer dans les années qui avaient précédé. En effet, des mesures avaient montré qu’une consommation de 50 kilos de charbons équivalaient à 40 litres d’essence et lorsque l’on sait que l’essence avait un coût nettement supérieur, le bilan économique était largement en faveur du charbon de bois qui dégageait une économie de 70% (35 francs contre 116francs pour l’essence). De plus, des essais menés sur la carbonisation de vieilles traverses réformées avaient conclu que celles-ci étaient parfaitement adaptées à la production d’un charbon de bois de qualité (procédé Geka). Les stocks des réseaux étant de l’ordre de 300 000 tonnes par an, la ressource paraissait presque inépuisable.
C’est dans ce contexte que les chemins de fer de l’Etat passaient commande en 1937, à la société de Dietrich, de 3 automotrices à gazogène à charbon de bois dont les premières livraisons ont été faites à la toute nouvelle SNCF au premier semestre 1938.
Caractéristiques générales
Avec sa face avant profilée de façon un peu exagérée eu égard à sa vitesse limite de 120km/h, l’autorail n’a pas attendu très longtemps avant de se voir affublé du surnom de « pointu ».
La caisse avait une longueur de 22,85 mètres, attelage automatique Willison compris, et une largeur de 2,87m. La tare était de 32 tonnes pour une masse en pleine charge de 42 tonnes. L’automotrice offrait 54 places assises en 3ième classe (nous sommes dans les années 30) dont 5 places sur strapontins, les autres étant constituées de banquette 3+2. Deux plateformes d’accès pouvant accueillir 46 voyageurs debout et un compartiment à bagages de 1000 kilos d’emport complétaient l’offre.
Chaque extrémité disposait d’un poste de conduite, un côté moteur et l’autre côté bagages. La trémie à combustible était placée face au wc, entre une plateforme d’accès et le compartiment à voyageurs. Une grande partie du mécanisme constitutif du gazogène était située sous la caisse. Vous pouvez aussi noter sur le diagramme ci-dessous la présence d’une chaudière (D) qui assurait le chauffage par circulation d’eau chaude.
Caractéristiques techniques
a) Le moteur
Le moteur Panhard VK 12F2 G de 12 cylindres en V, qui avait une cylindrée de 29,5 litres (alésage 140 et course de 160mm), fonctionnait au gaz pauvre. A la vitesse de 1750 tours/mn, il développait une puissance de 280 chevaux(ou 270 selon d’autres sources) soit 80 chevaux de moins que son homologue à essence. Le groupe moteur reposait sur un bogie à grand empattement (3,9m) dont il était en prise avec ses deux essieux par une boîte de vitesse à deux sorties.
b) la transmission
La boîte de vitesse était de type Mylius à 5 vitesses synchronisées et deux arbres de sortie reliés par un différentiel. Les rapports étaient les suivants : 1ière 1 / 4,91, 2ième 1 / 2,765, 3ième 1,182, 4ième 1,131, la cinquième étant en prise directe.
L’inverseur de marche était disposé dans la boîte ce qui facilitait la commande d’inversion de sens et contribuait à l’allègement des ponts moteurs.
Les commandes de changement de marche, de débrayage et de synchronisation étaient réalisées grâce à l’air comprimé. Celles de l’embrayage et de l’enclenchement des vitesses par la détente des ressorts E et V représentés sur le schéma suivant qui reproduit une coupe de la boîte de vitesse dont les lignes d’arbre sont représentées sur un même plan pour faciliter la représentation.
Le changement de vitesse nécessitait trois actions consécutives de la part du conducteur :
- sélectionner la vitesse en plaçant le levier en regard du numéro de vitesse.
- commander le débrayage et la synchronisation en ouvrant le robinet d’air comprimé,
- commande de l’enclenchement et de l’embrayage par une nouvelle action sur le robinet d’air comprimé qui était relayée par l’action de ressorts
C) le gazogène
Le système utilisé était du type Panhard à combustion renversée. Le diagramme suivant montre les différentes composantes à savoir : le générateur, le refroidisseur et les épurateurs. Ces deux derniers prenaient place sous la caisse.
Le générateur, contiguë au compartiment voyageurs, comprenait deux parties, le corps où s’effectuait la combustion et une trémie d’une capacité de 2m3 pouvant contenir 500 kilos de charbon qui, compte tenu de la consommation d’1kg par kilomètre, permettaient une autonomie de 500 kilomètres. Le chargement se faisait sur le toit dont l’accès était facilité par une échelle.
Le refroidisseur était constitué de différents tubes raccordés à deux collecteurs dont celui d’amont relié au générateur et celui d’aval à deux tubulures qui dirigeaient les gaz « refroidis » à 100° vers 6 épurateurs répartis en deux groupes dont le rôle étaient d’assurer un filtrage.
Chacun des groupes d’épurateurs était relié au moteur par une tuyauterie qui conduisait le gaz épuré vers un mélangeur gaz/air pour créer le mélange explosif.
D) Carrière
D’abord immatriculés ZZy 24841 à 843, ces autorails de Dietrich seront rejoints en 1942 par 5 autres commandés par la SNCF en 1940. Ces derniers seront numérotés ZZD 3011 à 3015. Pendant la guerre, en raison de la pénurie d’essence, ce type de matériel sera beaucoup sollicité pour suppléer beaucoup d’autres qui étaient mis à l’arrêt pour ce motif.
En 1948, il était décidé de changer le mode de fonctionnement des moteurs pour les alimenter en essence ce qui portait la puissance à 360 chevaux. D’autres adaptations étaient apportées au système de refroidissement et à l’aménagement intérieur.
Puis ce sera le tour de l’attelage Willison qui sera déposé pour laisser la place à des organes d’attelage et de tamponnement plus traditionnels. La motorisation sera à nouveau changée puisqu’un moteur diésel Saurer BZDS de 320 chevaux équipera les ex de Dietrich à gazogène.
A l’inventaire de 1950, repris dans la correspondance Ferroviaire n°2H de 1950, les huit exemplaires étaient affectés à la région de l’Est.
Entre temps, la numérotation avait basculé dans les X, plus précisément XD 3001 à 3003 et XD 3011 à 3015.
La radiation interviendra dans les années 60.
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