30 Août 2021
Image d’illustration Didier Duforest, CC BY-SA 4.0 <https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0>, via Wikimedia Commons
Sources : RGCF juin 1933 site Gallica.bnf.fr/BnF, RGCF octobre 1932 site Gallica.bnf.fr/BnF, RGCF et T mai 1900 site Gallica.bnf.fr/BnF Loco Revue n° 433 décembre 1981.
Les voitures de banlieue à étages de l’Etat.
Il y a déjà 90 ans, les chemins de fer de l’Etat, comme ceux des autres réseaux, étaient confrontés à la croissance rapide du trafic des voyageurs de banlieue et de grande banlieue. Si on ne parlait pas encore, en termes de statistiques, de « migrant alternant » pour désigner le voyageur se déplaçant deux fois par jour pour se rendre de son domicile à son lieu de travail et inversement, la problématique qui se posait aux transporteurs pour assurer un service de qualité, confortable, rapide et sûr était semblable.
Les réponses face à l’augmentation du trafic ont d’abord été :
- d’augmenter les fréquences et la vitesse des rames ; la limite se trouvant dans la capacité de débit de la ligne,
- d’accélérer les temps de demi-tour en équipant les rames en dispositifs de réversibilité,
- d’accroître le nombre de voitures et donc la longueur des quais ; la limite se trouvant dans la gare pour laquelle toute extension n’était plus possible du fait des contraintes d’urbanisation comme Saint Lazare par exemple.
Une fois toutes ces pistes explorées, il ne restait plus que celle d’augmenter la capacité unitaire des rames. Pour cela, la solution résidait dans la construction de voitures à deux niveaux et c’est ce qu’ont entrepris les chemins de fer de l’Etat plus de 40 ans avant l’arrivée des VB2N (Voiture de Banlieue à 2 niveaux).
Construites par les Usines des Entreprises industrielles Charentaises à Aytré, ces voitures métalliques (acier à haute résistance et duralumin) à étages mesuraient 23,265 mètres et pesaient 47 tonnes à vide.
Une rame réversible de 8 voitures composée de 2 voitures mixtes 1ière et 2ième classes et de 6 voitures de 3ième classe avait une capacité de 2 040 voyageurs (debout et assis) contre 1524 pour les rames classiques de 9 voitures de banlieue qui avaient à peu près la même longueur
Loin des voitures à impériales de la fin du 19ième siècle qui ne disposaient ni du confort ni surtout d’une accessibilité suffisante avec leurs escaliers et plateformes uniques (voir-ci-dessous), ces voitures modernes offraient de larges dégagements et un accès facile pour permettre des sorties et montées rapides.
Les caractéristiques de ces voitures avaient été pensé pour :
- tirer le maximum des possibilités offertes par les limites du gabarit,
- offrir la plus grande capacité possible en n’utilisant que des bogies à deux essieux, la majeure partie de la voiture étant logée entre les deux bogies,
-maintenir des espaces de dégagement suffisant pour faciliter l’écoulement rapide et fluide des flux de passagers.
Voici une vue en coupe des différentes catégories de voitures et leurs capacités respectives.
Aménagements intérieurs
Comme dans les voitures modernes d’aujourd’hui à 2 étages, on retrouvait un agencement à 3 niveaux. L’accès à l’étage intermédiaire, qui était à la hauteur des quais surélevés, se faisait par quatre portes coulissantes dont deux avaient une ouverture de 1,5 mètre. L’entrée ou la sortie pouvait se faire à au moins 6 personnes en simultanée. Des tests avaient montré que l’évacuation complète des 278 personnes d’une voiture était réalisée en moins d’une minute.
Deux escaliers latéraux menaient à l’espace inférieur et un central à l’étage supérieur. Grâce à la faible épaisseur des planchers, un passage de 1,90m de hauteur était réservé tant dans le compartiment inférieur que supérieur.
Le châssis formait un caisson tubulaire de hauteur variable avec ses deux faces latérales et ses armatures de plancher. Il était démuni de cloisons transversales et supportait le pavillon.
Les bogies à deux essieux, montés sur boîtes SKF, étaient du type Pennsylvania. Le diamètre des roues mesurait 920mm. Celui de la fusée 130mm pour une longueur de 270mm. L’inscription en courbe de 80 mètres de rayon était notamment rendue possible grâce à des longerons de forme spéciale qui facilitait en outre l’engagement sous les escaliers (vue ci-dessous).
En raison de la faible hauteur sous caisse, les dispositifs habituels de freinage (cylindre, timonerie) n’avaient pu y être installés. Les concepteurs avaient dû avoir recours à un freinage séparé des bogies, les installations (cylindre, triple valve et réservoir auxiliaire) prenant place à chacune des extrémités. Pour la même raison, la conduite générale passait à l’extérieur sous une galerie à bagages de l’étage inférieur.
De même les deux freins à vis agissaient chacun sur un bogie différent.
La fermeture des portes était automatique, elle était réalisée au moyen d’un dispositif électropneumatique avec un contrôle par sonnerie qui se déclenchait également en cas d‘ouverture en cours de route.
Carrière/utilisation
Ces voitures très modernes et novatrices pour l’époque ont d’abord été utilisées sur la banlieue de Saint Lazare pour laquelle elles avaient été conçues. Neuf de celles-ci, sur les 50 livrées, disposaient d’une installation de réversibilité afin de faciliter l’exploitation des dessertes en antenne.
Un peu plus tard, une partie d’entre-elles rejoindra la banlieue de Paris Montparnasse avec une composition adaptée.
Les rames de voitures à deux étages ont été tractées par de nombreuses catégories de locomotives comme les 3-141TC/ TD et BB17000 sur Saint Lazare ou comme les 2D2 5400 et BB800/900 sur Paris Montparnasse.
Les voitures à étages ont été retirées du service à la fin de l’année 1982, on en retrouvait encore en 1981 (6 rames réversibles) assurant la desserte omnibus de Paris à Mantes. Leurs longévités de près de 50 ans montrent qu'elles étaient parfaitement adaptées aux dessertes de banlieue. Les rames à deux niveaux que nous voyons circuler aujourd'hui ont repris une grande partie de leurs architectures et de leurs concepts.
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