6 Août 2021
Image d’illustration Le Génie Civil 6 août 1927 Site gallica.bnf.fr/BnF
Sources : Le génie Civil 6 août 1927 Site gallica.bnf.fr/BnF, Revue générale des chemins de fer et Tramways 7/1923 Site gallica.bnf.fr/BnF , Revue Générale des Chemins de fer et Tramways 8/1923 Site gallica.bnf.fr/BnF, Revue Ferrovissime n°17 juin 2009.
Locomotives BB MIDI E4000/E4500 futures BB1500 et 1600
Nous avons vu dans un précédent article que, simultanément aux travaux d’électrification du réseau du Midi, ce dernier avait dû adapter son parc moteur à ce nouveau mode d’alimentation. Outre les automotrices, les locomotives avaient aussi bénéficié de ce renouvellement comme par exemple la 2C2 décrite dans un précédent article (https://cheminot-transport.com/2021/08/les-premieres-locomotives-electriques-pour-trains-rapides-les-2c2-e3100-midi.html)
La deuxième série qui a vu le jour à cette occasion a été une machine de type BB. Voici une photographie de la E4503, locomotive construite par les CEF (Constructions Electriques de France) situées à Tarbes.
La mise en service de la première locomotive (sur la première tranche de 50 commandées) a eu lieu le 30 octobre 1922. Prévues pour les parcours Dax/Toulouse ainsi que pour les antennes se greffant sur ce trajet, ces locomotives BB étaient destinées à la remorque des trains de voyageurs ordinaires et des trains de marchandises. Les machines pour les services voyageurs différaient de celles du service des marchandises sur quelques points :
- les rapports d’engrenage qui étaient de 3,14 pour les plus rapides et de 5,066 pour les autres,
- l’attelage entre bogies et le système d’équilibreurs
- le freinage électrique par récupération pour les machines des trains de voyageurs et rhéostatique pour les autres. Cette dernière information sur les deux types de freinage est apportée par le génie civil de 1927 alors que la RGCF et Tramways de 1923 indique que les deux types de machines disposent du freinage par récupération. Cette dernière revue donne même les plages d’utilisation de ce freinage : entre 32 et 60km/h pour les voyageurs et entre 20 et 37 km/h pour les marchandises. Est-ce qu’il y a eu des modifications apportées entre 1923 et 1927 ou est-ce que l’une des sources est erronée, je laisse à d’éventuels experts qui liraient cet article d’en apporter la précision en commentaires.
L’élément complémentaire fourni par la RGCF et T à ce sujet concerne l’efficacité du type de freinage par récupération. En effet il est indiqué que, quelle que soit la pente, « ces machines peuvent freiner par récupération un train d’un tonnage égal à celui qu’elles peuvent remorquer en puissance unihoraire sur la même rampe »
Caractéristiques générales
Le tableau ci-après reprend les caractéristiques de ces locomotives BB avec les différences Voyageurs / marchandises.
Descriptif Technique
a) Stabilité Longitudinale et transversale
Comme nous l’avons vu pour la 2C2, des recherches poussées avaient été réalisées dans ces domaines et avaient débouché sur l’application d’un certain nombre de principes nouveaux. Des études similaires avaient été menées pour ces locomotives à deux essieux moteurs.
Dans la Revue Générale des Chemin de Fer et Tramways de Juillet 1923, l’étude est si détaillée qu’elle comporte 3 pages d’équations ! Heureusement, la revue du Génie Civil du 6 août 1927 a pensé que les lecteurs ne devaient pas forcément tous sortir de Polytechnique et a donc rédigé une petite synthèse de quelques phrases qui donne les solutions retenues. La voici :
« Dans le but d’assurer une tranquillité de plate-forme parfaite, on a cherché à augmenter la période d’oscillation de la caisse ; le résultat a été obtenu en utilisant des pivots qui présentent leur concavité vers le bas, contrairement à la disposition ordinairement adoptée ; ce procédé rendant toutefois la caisse instable dans le sens transversal, on a placé de part et d’autre des équilibreurs élastiques, basés sur les propriétés du triangle de Robert, qui assurent la stabilité désirée. Les équilibreurs des locomotives à voyageurs sont constitués par des ressorts à lames, ceux des locomotives à marchandises par des ressorts à boudins. »
Pour ceux qui veulent en savoir plus sur les propriétés du triangle de Robert citées dans le passage ci-dessus, ils trouveront en fin d’article une annexe fournissant l’explication donnée par la RGCF et T.
b) Bogies/ Essieux
Les bogies à deux essieux étaient attelés entre eux à l’aide de deux barres d’attelage, celle inférieure étant la barre proprement dite, la supérieure était montée avec un jeu pour ne pas travailler, elle devait servir uniquement en cas de rupture de la première. Du fait de l’attelage des bogies, la caisse n’était posée que sur un pivot fixe, l’autre pivot permettait un déplacement longitudinal car il était monté sur glissières.
L’empattement d’un bogie était de 2,8 mètres et l’empattement total de 8,35 mètres.
Les caractéristiques des essieux sont reprises dans le tableau ci-dessous.
Les moteurs, qui étaient du type à suspension par le nez, attaquaient l’essieu correspondant au moyen de deux trains d’engrenages. Les roues dentées étaient fixées sur les centres des roues afin de limiter les efforts de torsion sur l’essieu qui auraient pu entrainer sa rupture. Ci-après la photographie d’un essieu avec ses roues dentées.
Tableau des engrenages
c) Système de frein
Outre le frein électrique déjà abordé, les BB Midi étaient pourvues du frein automatique Westinghouse et du frein modérable. Chaque bogie était doté de 8 sabots.
Un frein à vis de secours commandé par un volant à chacune des extrémités de la caisse pouvait agir sur l’une ou l’autre (ou sur les deux) des timoneries des bogies.
d) Moteurs
Les moteurs de traction étaient du type DK 80. Ils étaient alimentés soit en 750 volts soit en 1500 volts selon que les moteurs d’un même bogie étaient alimentés en série ou en parallèle.
La puissance fournie par unité était de 250 chevaux (140 ampères) à 630 tours/mn et 350 chevaux (200 ampères) à 550 tours/mn en régime unihoraire.
Les caractéristiques principales étaient les suivantes :
Carrière
Cinquante locomotives pour trains de voyageurs (E4501 à 4550) et 40 locomotives pour trains de marchandises (E4001 à 4040) étaient déjà en service en 1927. Ces dernières ont été réaffectées dès 1950 à la manœuvre après avoir reçu les adaptations nécessaires. La numérotation de ces locomotives à grandes persiennes basculait alors dans la série des BB1500. Elles seront utilisées pour les manœuvres en gare et pour les débranchements dans les triages (parfois en UM) parmi lesquels on peut citer Juvisy, Sibelin, Saint-Jory, Paris Tolbiac, Toulouse Raynal, Villeneuve Saint Georges etc.. Elles seront réparties sur la plupart des dépôts de la région (réseau par la suite) Sud-ouest mais également sur le Sud-est.
Les E4500 seront d’abord renumérotées BB4501 à 4550. Entre 1954 et 1957, elles subiront le même sort que les E4000 en étant reconverties à la manœuvre dans les ateliers d’Oullins. Utilisées pour des remontes de rames voyageurs ou des manœuvres, les BB1600 officieront entre Paris Montparnasse et Montrouge, entre Paris Austerlitz et Masséna, entre Paris Lyon et Conflans mais aussi dans des gares comme Limoges, Béziers et bien d’autres.
Les premières radiations des BB1500 interviendront en 1970 (BB1526) et les dernières en 1979. Quant au BB1600, c’est en 1979 que les premières surviennent et 5 ans plus tard ce sera au tour de la dernière encore en activité à tirer sa révérence, la BB 1613.
Si vous voulez en savoir plus sur leurs carrières, sachez que le Ferrovissime n°17 de Juin 2009 décrit avec force détails les pérégrinations de ces machines. Vous pouvez le télécharger pour 3,26€ sur le site 1001 mags.
Cette locomotive, qui aura d’abord marqué l’histoire des Chemins de fer du Midi en étant la première à circuler sous 1500 volts continu, sera, grâce à sa seconde carrière dans les manœuvres, connue de plusieurs générations de cheminots.
Ceux qui ne l’ont pas vu dans ses œuvres peuvent aller la découvrir à Mulhouse. Grâce à un tour de force des ateliers de Béziers qui sont arrivés à panacher des éléments de la BB1501 et de la BB1632, les séries des E4000 et E4500 continuent d’exister à travers celle exposée à la Cité du Train.
Annexe
Explication du principe du triangle de Robert.
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