14 Novembre 2021
Image d’illustration Tangopaso, Public domain, via Wikimedia Commons
Source : Revue générale des chemins de fer février 1949 site Gallica.bnf.fr/BnF,
Locomotive 241 P
Dans l’article sur la 241 C1 https://cheminot-transport.com/2021/11/locomotive-241-c1.html , je citais la 241 P comme étant issue des enseignements que le PLM et la SNCF avaient tirés du prototype 241 C1. Les différents organes du prototype avaient été éprouvés sur près de 500 000 kilomètres ce qui laissait entrevoir une grande fiabilité de ce type de machine.
Bien que ce dernier aspect soit primordial, la raison principale du choix de la 241 C1 comme base des études pour la 241 P résultait de l’analyse prospective que la SNCF avait menée dès la fin de la guerre. A ce moment là, les prévisions de trafic pour la décennie à venir faisaient état d’un besoin de remorque de trains de voyageurs d’un tonnage de 630 à 700 tonnes à des vitesses élevées du type de celles pratiquées juste avant guerre. Sur les grandes artères à profil difficile comme Paris Lyon ou Paris Belfort, les rampes de 8mm/m nécessitaient l’emploi de locomotives disposant d’un poids adhérent élevé couplé à une puissance au crochet d’au moins 2500 chevaux. D’autre part, pour assurer des vitesses élevées de l’ordre de 120 km/h voire plus, l’utilisation de roues à diamètre de 2 mètres était une nécessité.
Le nombre de locomotives du parc SNCF répondant à ces critères étant en nombre trop restreint, la décision fut prise de commander, le 3 octobre 1945 aux Etablissements Schneider, 35 exemplaires dérivés du prototype 241 C1 qui semblait concilier au mieux la puissance et la vitesse recherchées.
La nouvelle série bénéficiait non seulement des évolutions technologiques qui avaient vu le jour depuis 1931 mais aussi des nouvelles règles de normalisation édictées par la SNCF avec l’utilisation d’organes standards comme les soupapes, les vannes etc. Mais comme il s’agissait d’une adaptation d’un modèle existant, il n’était pas question de reprendre la totalité des études ce qui aurait été sources de délais supplémentaires et d’alourdissement des coûts. Certaines des nouvelles techniques n’avaient donc pas été retenues pour cette machine considérée un peu comme une locomotive de transition. C’était le cas, par exemple, du châssis qui était resté à longerons au lieu du type monobloc ou des roulements par coussinets au lieu des boîtes à rouleaux.
La rapidité et la maîtrise des coûts primant, le premier exemplaire sortait des ateliers du Creusot le 24 mai 1948.
Caractéristiques générales
La 241 P était une machine à moteur compound comportant 2 cylindres HP et 2 BP avec une chaudière timbrée à 20 bars et des tiroirs de distribution Walshaerts. Les principales caractéristiques sont reprises dans le tableau suivant.
Principales modifications apportées par rapport au prototype 241 C1
è Un chargeur mécanique (stoker) de type HTI de la société « Stein et Roubaix » équipait dès l’origine les 241 P. L’installation de celui-ci avait entraîné des adaptations à la chaudière comme la mise en place d’une porte de foyer adaptée, l’allongement à l’arrière de la voûte(1) du foyer et l’installation d’un cendrier de type spécial à entrées d’air latérales.
(1) installation d’une « Arch Tubes » c'est-à-dire des tubes d’eau support de voûte à la place des briques traditionnelles
è Remplacement du surchauffeur Schmidt par un surchauffeur plus perfectionné suite à la modification du réseau tubulaire.
è Très légères modifications du diamètre des cylindres BP et HP mais avec la même disposition des cylindres et la même attaque (BP => 2ième essieu accouplé ; HP => 3ième essieu qui était coudé). A ce sujet, il me parait intéressant de vous communiquer le schéma suivant qui reprend, selon les différents types de machines et selon les époques, l’évolution de la disposition des cylindres sur les machines compound.
è Augmentation des sections de passage de la vapeur afin de permettre un meilleur écoulement de celle-ci. Le tableau suivant montre l’évolution sensible des sections de passage entre le prototype 241 C1 et la 241 P (+59% pour le HP et +34% pour le BP)
è Le châssis de la 241 P avait été renforcé en 7 points par rapport au prototype soit par adjonction de pièces en acier moulé soit par renforcement des pièces d’origine. La figure suivante montre, à l’aide de flèches verticales, les 7 points qui avaient fait l’objet de consolidation.
è Le graissage avait été amélioré grâce à l’utilisation de 2 graisseurs mécaniques « Lavalette» munies de dispositif de réchauffage et offrant 24 départs pour le graissage du mécanisme (glissières, boîtes à huile des essieux etc) et 18 départs pour les cylindres.
è L’abri de la 241 P avait été aménagé pour offrir plus de confort à l’équipe de conduite que sur la 241 C1. C’était notamment le cas pour la toiture qui avait été allongée, les parois latérales qui avaient été dotées de larges baises vitrées. Voici une vue de l’abri.
è Le tender unifié de type 34 P, dont les capacités sont données ci-après, était équipé, comme la locomotive, du traitement intégral des eaux d’alimentation selon le système TIA. Ce procédé chimique qui évitait la formation de tartre avait été mis au point par un des plus célèbres cheminots, Louis Armand qui était aussi compagnon de la Libération et membre de l’académie française. TIA signifie : Traitement Intégral Armand.
Caractéristiques du Tender
Premiers essais et carrière
Les premiers essais menés entre Laroche et Dijon avec des trains de 600 à 800 tonnes avaient montré que les modifications apportées par rapport à la 241 C1 avaient été bénéfiques. Avant que les mesures complètes aient été effectuées, on pouvait déjà noter une progression de 400 chevaux au crochet à 100 km/h (2900ch contre 2500).
Affectées au dépôt de Dijon pour assurer les trains entre Paris et Lyon, les 241 P furent mutées vers le Sud au fur et à mesure de l’avancement de l’électrification du réseau SE.
Les 241 P connaitront, dans leurs affectations ultérieures, presque toutes les régions SNCF (SE, Nord, Est, Ouest et l’ancienne région Méditerranée).
La radiation des dernières locomotives de cette série interviendra au début des années 70.
Quelques 241 P sont préservées dont notamment la 241P 16 exposée à Mulhouse, la 17 au Creusot, et la 9 à Toulouse qui est en cours de restauration https://www.241p9.fr/
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