29 Décembre 2023
Sources : Revue Notre Métier 13 mai 1947, RGCF Novembre 1929, Notre Métier 14 octobre 1947 site Gallica https://gallica.bnf.fr/,
Livraison de la Décapod 150 E 35 par les ateliers de Bischheim après remise à neuf
Dans la continuité de l’article précédent sur la reconstruction du chemin de fer après la deuxième guerre mondiale ( Contribution des cheminots à la résistance et à la reconstruction. - Cheminot Transport (cheminot-transport.com) ), voyons aujourd’hui ce que les ateliers du matériel étaient capable de faire dans un laps de temps très restreint.
Au 30 mars 1946, l’atelier de Bischheim avait déjà réparé 250 locomotives alors qu’après la guerre, les machines-outils et les installations étaient gravement endommagées voire inutilisables.
Au 31 mars 1947, ces mêmes ateliers fêtaient la sortie de la 500ième locomotive, une magnifique 150 E35 du dépôt de Chalindrey construite à partir de 1926 par la société alsacienne de construction mécanique.
Mais ce qui est le plus surprenant, c’est lorsque l’on voit l’état de cette même machine juste deux mois auparavant.
Avec la chaudière pulvérisée par les bombardements, le châssis faussé et les bielles tordues, cette machine faisait peine à voir et il aurait fallu être bien prétentieux pour affirmer qu’elle serait livrée toute clinquante deux mois après.
Ci-dessous le chef d’arrondissement MT, monsieur Redslob, remerciant les ouvriers, cadres et techniciens.
Encore plus surprenant est le nombre de voitures à voyageurs et de wagons réparés pendant ce laps de temps (1 000 jours). Jugez plutôt :
La cadence est simple à calculer : 11 voitures et 200 wagons par jour !
Terminons en disant un mot de cette belle locomotive 150 Est qui était la première locomotive française de ce type.
Equipée de 3 cylindres à simple expansion, cette Décapod à vapeur surchauffée avait été construite à 125 exemplaires (tranches de 5211 à 5235 et de 5236 à 5335)
Pourquoi avoir retenu cette catégorie de machine ?
La Compagnie des chemins de fer de l’Est avait reçu, au titre des dommages de guerre, 5 locomotives Décapod de la série XIIIh. Ces machines, qui étaient dotées d’un surchauffeur Schmidt et de 3 cylindres dont deux extérieurs qui actionnaient le 3ième essieu et un, entre les longerons, relié au deuxième essieu couplé, s’étaient montrées bien adaptées à la traction des trains lourds de marchandises grâce notamment à un poids adhérent de 84 tonnes. S’inspirant de ce type d’engins, la compagnie de l’Est avait décidé de commander des locomotives analogues mais en y apportant quelques améliorations ou quelques adaptations propre à son réseau.
D’une longueur de 12,815 mètres, les locomotives de la première tranche avaient une masse à vide de 86,6t et à charge de 96,7t (87,2t et 97,2 pour la deuxième tranche). Le poids adhérent étant, quant à lui, de 82,5t (ou 83t pour la deuxième tranche)
Le dessin ci-dessous reprend les différentes cotes.
La chaudière était timbrée à 14kg /cm2 et la grille avait une surface de 3,27m2. La surface totale de chauffe représentait plus de 300m2 dont 93 m2 pour la surchauffe (surchauffeur Est du type DM). L'échappement variable était du type à trèfle.
Le diamètre des roues couplées mesurait 1400 mm et celles du bissel 920mm. Malgré un empattement rigide de 6,2 mètres, le passage dans des courbes de 90 mètres de rayon avait été rendu possible grâce à la suppression des boudins de l’essieu central et à l’amincissement des deuxième et quatrième essieux couplés.
La 150 E pouvait être accouplée aux différents tenders disponibles sur l'EST (22,25,28,32 ou 35m3) grâce à une attache spéciale.
Les autres caractéristiques sont reprises ci-dessous.
En termes de performances, cette 150 E avait la capacité de tracter des trains de 2 200t en palier à une vitesse moyenne de 45km/h. Selon les déclivités, les charges remorquables étaient de 1400 t en rampe de 8mm/m et de 1150t en rampe de 10mm/m pour une vitesse moyenne de 20km/h.
L’effort de traction s’établissait à 8100 kg à la jante pour une puissance d’environ 1600ch.