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Cheminot Transport

Les rames Michelin : une existence éphémère de 1948 à 1956.

images d'illustration. Notre Métier 31 Mars 1952 site Gallica BNF

Sources: la locomotion Moderne 1951 livre personnel, La science et la vie janvier 1949 retronews, RGCF 1/1947, 5/1948, 10/1952, 7/1956, journal Combat 11/02/1949, journal La Croix 11/02/1949, La Bourgogne Républicaine 12/02/1919 site retronews, Revue Notre Métier Site Gallica BNF

Les rames Michelin : une existence éphémère de 1948 à 1956.

S’appuyant sur l’expérience réussie des autorails « Michelin » et notamment sur le confort apporté aux voyageurs en termes de réduction du bruit, la maison du célèbre pneumatique a proposé à la SNCF de poursuivre leur collaboration en l’appliquant aux voitures à voyageurs. Les premières réflexions avaient été menées dès 1939 mais la guerre avait mis en sourdine ce projet ambitieux.

L’idée était de mettre en service des rames constituées de voitures montées sur pneumatique et remorquées par des trains à vapeur. Dans cette époque d’après guerre où toute idée novatrice visant à développer le chemin de fer était la bienvenue, la SNCF accepta  cette nouvelle collaboration et fit construire trois rames de six voitures.

Revue Notre Métier 31 mars 1952 site Gallica BNF

Vu la résistance à l'avancement de ces rames sur pneus, la traction de ces trains avait été confiée à une douzaine de 230K modifiées à cet effet. Outre l'adoption d'un carénage simplifié, quelques adaptations avaient été apportées comme de nouveaux injecteurs ou l'adjonction d'un réchauffeur ainsi que le passage au fioul. Voici une des locomotives modifiées: la 230K248 identique à la 230K251 de la vue ci-dessus.

Tangopaso, Public domain, via Wikimedia Commons

Ces rames étaient destinées aux relations de jour et ne disposaient donc pas de voitures lits ou de couchettes. Le train était composé de la façon suivante :

- une voiture de première classe de 46 places

- une  voiture Bar + des sièges de première classe au nombre de 27 (voir le diagramme ci-dessous.

RGCF septembre 1949 retronews

- une voiture restaurant de 48 couverts.

- deux voitures de seconde offrant 64 places

- une voiture fourgon + des places de seconde au nombre de 48.

Les voitures étaient du type à couloir central et mesurait 23 mètres.

La rame, hors machine, avait une longueur de 140mètres pour un poids de 126T. La capacité totale était de 250 places dont 74 en première et 176 en seconde.

L’apparence extérieure d’une voiture avec les bogies comportant 5 essieux est reproduite dans le dessin suivant.

RGCF septembre 1949 retronews

En voyant le nombre d’essieux si important pour une simple voiture-voyageur, on peut se demander quelle en est la cause surtout lorsque l’on sait que la tare n’était que de 17t pour un poids total en charge de 21t. L’explication réside dans la charge par roue qui  ne devait pas dépasser 1200kg compte tenu des pneumatiques qui les équipaient. Avec 20 roues au total, le poids en charge de 21t restait donc bien en-deçà de la limite.

Pour respecter ces contraintes de poids, on avait eu recours à des structures allégées dont trois types différents avaient été testés :

- un alliage d’aluminium en construction rivée (Duralumin)

- un acier inoxydable suivant le système Budd (automotrice)

- un acier ordinaire

En fait il s’agissait de comparer les avantages et les inconvénients de ces trois techniques en vue de faire les bon choix ultérieurs.

La vue ci-dessous montre le détail des bogies à 5 essieux.

Livre Locomotion moderne 1952 collection personnelle

Les roues extrêmes sont encadrées par un frotteur de shuntage (à droite) pour assurer le fonctionnement normal des circuits de voie. Noter le manomètre en haut de la roue qui indiquait la pression du pneu qui était gonflé à 9kg/cm2 soit 50% de plus que les premières michelines grâce à une carcasse métallique qui renforçait le bandage. Comme pour les pneumatiques des automobiles d’aujourd’hui, la durée de vie était estimée à 35 000km avant remplacement. A gauche se trouvait un galet d’appui.

Livre Locomotion Moderne 1952 Collection personnelle

Cette roue sur pneu ne ressemblait pas pour autant à une roue automobile mais bien à une roue de chemin de fer. En plus du pneu, un boudin métallique saillant venait prendre appui sur la face intérieure du rail pour le guidage.

Et si un pneu crevait ?

Pas de problème, le cas était bien sûr prévu et faisait appel à un montage astucieux. Chaque essieu était relié au châssis par des blocs de caoutchouc soudés à des carcasses métalliques (procédé « Bibax ») de sorte que lorsqu’il y avait une crevaison, le faible écrasement des caoutchoucs maintenait le pneumatique suspendu  tout en répartissant la charge sur les autres roues.  Comme nous avons vu que l’on disposait d’une marge de 3 tonnes entre la charge que peuvent supporter les 20 roues (20x1200 = 24t) et le poids maximum par voiture de 21tonnes, la voiture pouvait continuer son parcours sans restrictions jusqu’à destination. Si plusieurs roues avaient une crevaison  simultanée, le conducteur en était informé par un voyant qui s’allumait au tableau de bord lorsqu’il y avait un défaut de pression dans un pneumatique (manomètre vu précédemment). Des restrictions de vitesse étant alors appliquées.

Disons un mot pour terminer sur les aménagements intérieurs qui avaient été particulièrement soignés pour rendre les longs parcours agréables.

Les choix des coloris intérieurs devaient former un ensemble gai et clair.

Livre Locomotion Moderne 1952 collection personnelle
Livre Locomotion moderne 1952 collection personnelle
Livre Locomotion moderne 1952 collection personnelle

Le chauffage et la ventilation avaient été soigneusement étudiés pour assurer le plus grand confort. L’éclairage, novateur pour l’époque, était constitué de tubes fluorescents qui ne faisaient pas passer inaperçu cette rame. En effet, dans plusieurs articles de presse, on parlait de ce météore qui éclairait la nuit (voir l’article de presse du journal Combat du 11 février 1949 ci-dessous).

journal le Combat 11 février 1949

Circulation commerciale.

Au service d’été 1948, la SNCF inaugurait les rames Michelin sur la relation Paris-Strasbourg (trains 3 et 4).

RGCF mai 1948 retronews

Moins rapides (5h10 pour le trajet)  que les autorails Bugatti  (4h25) qu’elles remplaçaient, elles avaient surtout l’avantage d’être plus capacitaires et un peu plus économique que les 100 litres d’essence au cent kilomètres de l’autorail Bugatti que j’ai décrit dans l’article https://cheminot-transport.com/2021/02/l-autorail-bugatti-ou-le-levrier-sur-rails.html

Le trafic augmentant, ces rames ont été remplacées sur Paris Strasbourg en 1952 par des rames métalliques offrant un plus grand nombre de places. Affectées à la relation Paris Bâle pour assurer les trains 46 et 47, elles y resteront jusqu’en juillet 1956, date à laquelle la SNCF annonçait que : «  les rames Michelin, arrivées à limite d’usage, sont remplacées par des rames RGP).

Le "pneurail" ne devait pas connaître de suite et Michelin allait se consacrer à son cœur de métier, le pneu routier, et allait devenir un des leaders mondiaux dans ce domaine.

 

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